Nous rencontrons aujourd’hui Hugues Chevalier, coordinateur de Grand’Rue, la fédération des arts de la rue en Nouvelle-Aquitaine, qui a pour but de structurer durablement le secteur des arts de la rue sur le territoire, avec le soutien de la région et du département de la Gironde.
Bonjour Hugues, présentez-nous Grand’Rue et ses différentes missions.
Tout d’abord, nous vous remercions pour cet article et cette invitation.
Grand’Rue est la fédération régionale des Arts de la Rue en Nouvelle-Aquitaine. A la croisée d’une fédération et d’une « tête de réseau », l’objectif principal est clair : structurer, promouvoir et défendre l’expression artistique en espace public.
Ce sont entre 80 et 100 adhérent.e.s (adhésion sur année glissante) qui échangent et travaillent en commun, avec un Conseil d’Administration (CA) paritaire de 20 membres et avec l’appui d’un salarié depuis 2021.
Il y a différents niveaux d’implication : le CA porte les missions et les fait évoluer. Les adhérent.e.s participent à la hauteur de leur capacité d’implication. Les sympathisant.e.s suivent les nouveautés et autres informations. Le bureau, paritaire également, élu au sein du CA, gère quant à lui le fonctionnement interne (comptabilité…), la relation au salarié et la représentation auprès des collectivités, des autres réseaux et syndicats.
Plusieurs missions sont actuellement portées pour poursuivre l’objectif principal, avec en permanence ce prisme de l’ouverture, de la croisée des regards (compagnies, opérateur.ice.s, collectivités…etc..) :
- Inter-connaissance et reconnaissance : organisation de rencontres internes (Assemblées Générales), de temps d’échanges ouverts (concertations SODAREP) et d’autres temps de rencontres (journées professionnelles…). Mise en place d’outils pour s’identifier et se localiser sur le territoire néo-aquitain (cartographies…) et organisation de rencontres professionnelles et publiques autour des Arts de la Rue et de l’Espace Public.
- SODAREP en Nouvelle-Aquitaine : très difficile à décrire succinctement. Il s’agit d’une démarche évolutive (« on avance en marchant ») horizontale (« toute parole est écoutée avec la même attention, peu importe qui la porte ») et ascendante (« partir du terrain »). Pour résumer très grossièrement : il s’agit d’une démarche d’observation, concertation ET développement des Arts de la Rue en région.
- COREPS : Grand’Rue représente la Fédération Nationale des Arts de la Rue (FNAR) au sein du Comité Régional des Professions du Spectacles (COREPS). C’est ici qu’échangent les organisations professionnelles, les organismes paritaires (employés et employeurs), les représentants de l’État et des collectivités territoriales, les membres invités (France Travail, AFDAS…) autour de la question de l’emploi dans le spectacle vivant.
- Égalité des Genres : une commission inter-régionale, dont fait partie Grand’Rue, axe son travail sur les rapports Femmes/Hommes dans les Arts de la Rue, et plus globalement sur l’égalité entre les genres. Elle s’est fixée 4 objectifs prioritaires : 1. Faire un état des lieux : observer, se compter et révéler les chiffres. 2. Influer et se faire entendre : représentativité et lobbying auprès de l’État, des pouvoirs publics, des organisations sociales et de la profession. 3. Sensibiliser et communiquer 4. Militer, sensibiliser et agir auprès des professionnels comme des publics.
- Structuration du secteur : développement d’outils et d’espaces pour nouer des relations, des partenariats, notamment avec les Agences Régionales, afin de structurer le secteur.
- Caus’Rue : vitrine de la fédération, à destination des publics, des habitant.e.s comme des professionnel.le.s, nous organisons sur divers festivals de la région (10 festivals en 2024), une réflexion collective sur l’espace public, sous la forme de débat mouvant. Vous retrouverez également sur ces festivals un stand d’information de la fédération.
La Fédération rassemble les professionnels dans leur diversité et forme un collectif de compétences actives et plurielles. C’est un réseau d’individus comme de structures qui composent le paysage des arts de la rue.
Pouvez-vous nous faire un tour d’horizon des arts de la rue en Nouvelle Aquitaine ?
Commençons par une tentative d’explication de ce qui se cache derrière ces termes : Arts de la Rue et de l’Espace Public (AREP).
En effet, les AREP ne se définissent pas par une esthétique. La définition tient plus du lieu où le spectacle est joué, et de l’accessibilité souhaitée, peu importe le(s) médium(s) utilisé(s) : arts visuels, cirque, danse, musique, pluridisciplinaire, théâtre, etc…. Il n’y a pas d’ordre si ce n’est alphabétique, ni de limite !
L’idée des individus, des structures et des opérateur.ice.s qui se réclament de ce domaine, est de proposer une expression artistique dans des lieux qui ne sont pas directement « dédiés » à la culture (comme des théâtres, par exemple, des salles de concerts…) : rues, espaces publics, espaces privés ouverts au public, urbanisme de transition, espaces naturels, parcs, friches… La liste est non-exhaustive, évidemment !
Arts de la Rue ou Arts en Espace Public ? Vous entendrez les deux. Certain.e.s voient une différence entre jouer « en espace public », qui sous-entendrait « avec l’espace public » : en prenant en considération les éléments d’urbanisme ou naturels qui le composent autant que celles et ceux qui l’habitent, et jouer « en rue » : en extérieur, avec humilité, dans le but de pouvoir offrir leurs créations à un public sans distinction sociale (malheureusement, la fréquentation des salles de spectacles n’est pas égale chez toutes les catégories socio-professionnelles) ni économique (beaucoup de spectacles en accès libre, ou à des tarifs très réduits).
Nous pensons que les frontières entre les deux sont beaucoup trop floues et que les termes Arts de la Rue et Arts en Espace Public sont tout simplement synonymes et englobent tous ces aspects dans les choix artistiques des créateur.ice.s.
Avant de vous donner quelques chiffres en région, esquissons un tour d’horizon qualitatif : à l’heure où nous écrivons ces lignes, la saison forte des Arts de la Rue est tout juste entamée mais ne s’annonce pas des plus simples, nous y reviendrons. Disons dans un premier temps que le public est au rendez-vous, en hausse de fréquentation d’années en années sur les évènements et autres festivals, que ce soit en ville ou à la campagne. Il y a bien quelques contre-exemples, principalement liés à une météo capricieuse ou à un choix des organisateur.ice.s. Et puisqu’on parle météo, voici une des multiples raisons de la complexité d’organiser un événement en espace public. Modifier les horaires, les lieux de jeu, parfois les dates du festival, en fonction de la météo (qu’elle soit caniculaire ou diluvienne !), font partie des capacités d’adaptation nécessaires et s’ajoutent à la somme des complexités à prendre en compte qu’il serait trop long d’énumérer exhaustivement (également parce que chaque évènement est intimement lié au lieu où il se déroule), mais qui englobent les nouvelles règles sécuritaires depuis les attentats de 2015, jusqu’aux contraintes induites par l’organisation des Jeux Olympiques en région parisienne (pas tant sur une éventuelle baisse de fréquentation, mais par manque de force de l’ordre, de personnel de sécurité et de sécurité civile, de disponibilité du matériel technique et de barriérage, mais également d’interdictions préfectorales, souvent induites par une méconnaissance desdits événements).
Et quelques chiffres pour la Nouvelle-Aquitaine, bien que l’exhaustivité soit difficile sur un territoire étendu, et dans un domaine mouvant et aux frontières si poreuses : 183 compagnies recensées, implantées dans les 12 départements de la région, en ville comme en campagne. 105 festivals qui ont au moins une proposition en espace public, 6 lieux de résidence exclusivement dédiés aux arts de la rue. 1 Centre National des Arts de la Rue et de l’Espace Public (label d’État).
Les chiffres de l’emploi sont difficilement identifiables car les frontières sont poreuses entre structures employant dans l’espace public ou non, mais une étude précise sur ce sujet est envisagée…
Qui peut faire appel aux différents services de Grand’Rue et comment de nouveaux adhérents peuvent-ils vous rejoindre ?
C’est la question simple : tout le monde !
Nous avons environ un tiers d’adhérent.e.s qui sont des individus. Que ça soit des technicien.ne.s qui travaillent régulièrement pour les Arts de la Rue, des artistes indépendant.e.s ou tout simplement des sympathisants.e.s, il suffit de vouloir promouvoir et développer l’art dans l’espace public.
L’adhésion est donc également ouverte à tout type de structure. C’est là une des particularités de notre réseau. Des compagnies, festivals, opérateur.ice.s diver.se.s, des lieux de résidence ou de diffusion, etc. tout type de structure qui œuvre dans les Arts de la Rue ou souhaite développer l’Art dans l’Espace Public…. deux synonymes, ndla !
Pour adhérer, tout est expliqué sur notre site internet (chèque, virement ou paiement via HelloAsso).
Quelles sont vos diverses activités et temps forts ? Quelle action aura été la plus marquante ?
Nous avons déjà mentionné nos missions et il serait trop long de toutes les détailler. Nous allons donc aborder deux temps forts importants de la fédé Grand’Rue :
- Les Caus’Rues et stands d’information (détails ci-dessous).
- Les « rencontres SODAREP » : depuis 2023, six territoires de concertations ont été entamés sur la région. Nous avons prêté une attention particulière à essayer de transmettre les invitations à toutes les personnes qui s’y trouvaient et qui pouvaient se sentir impliquées, de près ou de loin, dans les Arts de la Rue. Les compagnies bien sûr, opérateur.ice.s des Arts de la Rue (organisateur.ice.s d’évènements, de saisons ou de festivals), mais aussi les lieux de résidence, structures de production, etc. Il y a bien évidemment des erreurs et oublis, et nous nous excusons platement pour cela (il est toujours possible d’écrire à l’adresse sodarep@fedegrandrue.fr pour être rattaché à la démarche !) , mais nous avons essayé de faire pour le mieux avec des listes de 200 à 400 personnes par territoire.
Plusieurs rendez-vous, pour venir apporter votre parole, vos questions, vos idées, ont étés ou seront organisés. Ce sont d’ores et déjà 30 rendez-vous qui ont été donnés (présentiel et visio) et environ 150 entretiens téléphoniques réalisés. D’autres rendez-vous sont à venir après l’été et les dates seront transmises prochainement. Nous essayons de tenir à jour l’espace dédié au SODAREP de notre site internet, notamment avec les comptes-rendus des échanges autant que des comités techniques directeurs.
Quels sont vos projets en cours ?
Nous l’avons évoqué plus haut : nous sommes présent.e.s dans des festivals en région, à la fois avec un stand d’information, et aussi avec les Caus’Rues. N’hésitez pas à venir à notre rencontre sur le stand !
Cette année 2024, nous serons présent.e.s sur 10 festivals. Festirues à Morcenx-la-Nouvelle (40), Mai du Théâtre à Hendaye (64), et Fêtes le Pont à La Rochelle (17) sont déjà passés, mais vous nous retrouverez à :
- Mimos à Périgueux (24), Saint Amand Fait Son Intéressant à St Amand de Coly (24) pour les 900 coups, la Fête des Sottises à Salies de Béarn (64), Musicalarue à Luxey (40) au village des Arts de la Rue, au Festival des Arts de la Rue de Miramont de Guyenne (47), à Fest’Art à Libourne (33) ou encore aux Expressifs à Poitiers (86). Nous ne sommes pas allés en ex-Limousin cette année mais y étions l’an dernier et y reviendrons avec grand plaisir ! Nous ne pouvons malheureusement pas être présent.e.s tous les ans sur tous les événements mais l’envie est là !
Nous en profitons pour remercier tous ces organisateur.ice.s qui nous accueillent les bras ouverts, et avec qui nous collaborons, certain.e.s depuis de nombreuses années !
Qu’est-ce qu’on peut vous souhaiter pour 2024 et les années à venir ?
A moi personnellement (Hugues) : un ou une collègue ! (rires). C’est vrai que la charge de travail est importante et les belles perspectives, issues notamment des nombreux échanges sur le terrain, ne pourront voir le jour qu’avec une force de travail accrue !
Pour la fédération, souhaitons lui une belle continuité dans ses missions (ne pas oublier les missions de départ) autant que d’être en capacité de saisir les compétences, connaissances, ressources … pour répondre aux attentes des adhérent.e.s et de tout le domaine des AREP, attentes qui sont, comme ailleurs, en pleines mutations !
Mais ce qu’il faut surtout souhaiter, pour que les Arts de la Rue et de l’Espace Public perdurent, se structurent et se développent, c’est de porter haut et fort le message qui nous a rassemblé : l’ART EST PUBLIC !
Comment contacter Grand’Rue ?
📅 Formation
Les 18 et 19 novembre prochain, en lien avec le CNFPT (Centre National de la Fonction Publique Territoriale), l’APMAC propose une formation « Les arts de la rue comme enjeu des politiques culturelles locales », animée par Leïla Picard, directrice de projets culturels et membre du Conseil d’Administration de Grand’Rue.
Toutes les informations sur cette formation, destinée aux agents publics, sont accessibles en ligne via le site du CNFPT ; les inscriptions se font via la plateforme IEL.